Par : Maître Abdelmajid BARGACH, notaire à Rabat


I. Un centenaire qui oblige

Le notariat marocain célèbre aujourd’hui cent ans d’existence. Cent ans de pratiques, de luttes, d’adaptation, de résistance. Cette longévité est le fruit d’un combat mené par des femmes et des hommes qui ont cru en la noblesse de notre mission et en la puissance de la sécurité juridique.

Mais ce centenaire, s’il est un motif de fierté, doit être aussi un moment de vérité. Il nous impose une introspection collective : qu’avons-nous fait de notre solidarité ?


II. La solidarité notariale, un pilier ébranlé

La solidarité est le ciment de toute profession. Plus encore pour une profession comme la nôtre, fondée sur la confiance, l’honneur, et le respect mutuel. Pourtant, beaucoup de confrères et de consoeurs se plaignent aujourd’hui d’un recul flagrant de cet esprit de corps.

Les jeunes notaires, les confrères en difficulté, ceux frappés par la maladie ou des situations injustes, se sentent souvent seuls. La profession se déchire en clivages, en silences lourds, en indifférence.

Et pourtant, si notre métier s’est maintenu, c’est grâce à une minorité engagée, qui a donné sans compter, porté la parole notariale dans les lieux de décision, protégé les plus vulnérables, et rappelé inlassablement que l’éthique commence par la solidarité.


III. L’appel de la conscience professionnelle

Le texte fort et poignant de notre confrère Maître Adil Al Amrani pose la question avec courage : « De quelle solidarité parlons-nous ? »

Quand le notaire devient méfiant, isolé, désolidarisé… quand il vit dans la peur plutôt que dans l’estime… quand il redoute même parfois ses propres confrères… alors c’est le métier tout entier qui vacille.

Il est temps de briser le mur du silence. La solidarité notariale ne peut être une formule vide. Elle doit redevenir une pratique.


IV. Que faire concrètement ?

  • Écouter, soutenir et accompagner les confrères en détresse.
  • Créer des fonds d’entraide véritablement opérationnels.
  • Encourager la transmission, le parrainage, la mise en réseau.
  • Protéger les jeunes notaires des abus, et les notaires en fin de carrière de l’oubli.
  • Mettre fin à la complaisance envers ceux qui nuisent à l’unité professionnelle.

V. Une profession debout, ou fragmentée

Ce centenaire doit être un tournant. Il ne suffit pas de le célébrer par des discours. Il faut lui donner un sens. Et ce sens ne peut être trouvé que dans un renouveau moral de la profession.

Un notariat sans solidarité est un notariat exposé, vulnérable, et à terme… délégitimé.

Nous avons encore le choix. Le choix de faire de cette commémoration **le début d’une réconciliation entre les notaires, entre les générations, entre les pratiques.

Nous avons le devoir de dire à ceux qui ont tant donné pour cette profession, souvent dans l’ombre : Merci. Nous n’oublions pas.

Et nous avons surtout la responsabilité de construire l’avenir ensemble.

À quand la solidarité agissante ?


Maître Abdelmajid BARGACH

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Notaire - L'Etude Maître Bargach a été fondée en 1996 à Rabat
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