Par Maître Abdelmajid BARGACH, notaire et conseil en gestion du patrimoine

La question de la répartition équitable des biens après la dissolution du mariage demeure une préoccupation centrale dans la société marocaine contemporaine. En effet, malgré les réformes ambitieuses introduites par la Moudawana en 2004, les réalités économiques et sociales actuelles exigent une révision profonde des mécanismes de partage, notamment en intégrant la reconnaissance explicite des contributions non financières des femmes.

Selon les statistiques récentes, le taux d’activité des femmes au Maroc en 2022 était de seulement 19,8 %, signe révélateur d’un accès limité à l’autonomie économique. Cette situation se complique davantage lorsque l’on constate que les femmes, en particulier dans les milieux urbains, assurent une contribution domestique sept fois supérieure à celle des hommes, souvent au détriment de leur indépendance financière.

L’Article 49 de la Moudawana se présente comme un catalyseur potentiel du changement. Il reconnaît théoriquement la liberté pour les époux de convenir de la gestion des biens acquis durant le mariage, mais dans les faits, cette disposition reste largement méconnue ou sous-utilisée. Cela est dû principalement à un manque d’information ou à une incompréhension quant à son utilité réelle.

À l’aube d’une réforme attendue, il devient indispensable d’opérationnaliser pleinement cet article. Il est notamment urgent de valoriser juridiquement les contributions non matérielles des femmes telles que la gestion du foyer, l’éducation des enfants, ou encore le soutien professionnel et moral apporté au conjoint. Cette valorisation nécessite d’établir des critères objectifs d’évaluation : temps consacré aux tâches domestiques, équivalence avec des services professionnels, impact de la renonciation professionnelle et contribution à la réussite économique du conjoint.

Toutefois, la réforme législative seule ne suffit pas. Le rôle des notaires et des adouls doit évoluer vers un véritable accompagnement juridique des futurs époux. Informer systématiquement les couples sur l’importance de formaliser clairement leur régime matrimonial dès la signature de l’acte de mariage apparaît essentiel. Cela peut se concrétiser par une simple clause informative à cocher, indiquant que les conjoints ont pleinement compris leurs options et leurs droits en matière de gestion patrimoniale.

Au-delà des ajustements juridiques nécessaires, une transformation culturelle profonde est impérative. La société marocaine doit reconnaître de manière explicite la valeur des contributions non financières au sein du couple, afin de garantir une équité véritable entre hommes et femmes.

Enfin, pour répondre efficacement à cette problématique, il sera crucial de déterminer des critères objectifs et justes permettant d’estimer la contribution immatérielle des femmes. Une approche multidimensionnelle, intégrant des analyses comparatives, la valorisation économique du temps consacré au foyer, ou encore l’impact des sacrifices professionnels consentis, sera indispensable.

Cette démarche proactive constitue une révolution juridique et culturelle majeure, en parfaite conformité avec les principes de l’islam qui prônent l’équité, la justice et le respect des droits de chaque conjoint. Ainsi, le Maroc, en conjuguant tradition et modernité, fera un grand pas vers l’établissement d’une véritable justice sociale au cœur de la cellule familiale.

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Notaire - L'Etude Maître Bargach a été fondée en 1996 à Rabat
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